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Édition #10 | avril 2023 | Voir ce message dans votre navigateur | Abonnez-vous

Une vingtaine de CRESUS ont été transmis à la DSAC depuis le dernier bulletin AlphaTango.

C’est un chiffre prometteur, que nous pouvons encore faire progresser tous ensemble ! Une augmentation du nombre de CRESUS n’est pas un symptôme de dégradation de la sécurité, mais réellement d’une amélioration d’une culture de sécurité réactive et en croissance.

Guide – Notification et traitement des évènements de sécurité en UAS

Formulaire CRESUS – Compte-rendu d'évènement de sécurité UAS

Objectif Sécurité

DES RETOURS TOUJOURS PLUS NOMBREUX : MERCI !

Comme pour l’aviation habitée, c’est l’absence totale d’incidents qui doit inquiéter : des événements surviennent, même dans des systèmes les plus sûrs.

Les notifier et les analyser, c’est se donner l’opportunité de prévenir des événements potentiellement plus graves, identifier les barrières de sécurité qui fonctionnent et renforcer les moins efficaces.

Au sommaire de ce bulletin, nous vous proposons :

  1. Une présentation générale de la démarche de sécurité qui peut être associée à un événement, à travers un CRESUS sur un événement survenu en BVLOS
  2. Un focus sur les événements liés aux batteries

Bonne lecture à tous, bons vols !

RAPPROCHEMENT ANORMAL AVEC UN AÉRONEF HABITÉ EN BVLOS

Les circonstances de cet évènement sont rapportées avec l’accord des personnes concernées. L’évènement est volontairement anonymisé et simplifié pour en faciliter la compréhension.
– Photo de Ma Ti
 

L’exploitant conduit des vols de surveillance d’infrastructures. S’étendant sur plusieurs kilomètres, ils sont réalisés à faible hauteur et hors vue du télépilote. Ce type d’opération est réalisé en catégorie Spécifique, sous autorisation d’exploitation délivrée par la DSAC. Le concept d’opérations prévoit que le drone évolue de manière automatique sur plusieurs kilomètres afin de capturer des images des infrastructures pour en vérifier le bon état.

Le jour de l’évènement, un exploitant d’aviation habitée réalise une mission similaire : l’avion évolue à une hauteur d’environ 500 ft (150 m). Parvenant à proximité d’un aérodrome, le pilote indique sa position et ses intentions sur la fréquence d’auto-information de l’aérodrome. Il explique qu’il entend alors sur cette même fréquence une personne signalant la présence d’un drone dans le même secteur et à une hauteur de 120 m / 400 ft.

Le pilote de l’avion explique alors qu’il a gagné de l’altitude tout en poursuivant sa route, puis indique avoir ensuite eu le drone en visuel, ce qui lui a permis d’assurer l’espacement avec celui-ci. Le croisement s’effectue avec une séparation estimée par l’exploitant avion à 400 m au moment du croisement. Aucun dommage n’est à rapporter et les missions ont pu se poursuivre sans incident.

Une telle situation est néanmoins problématique : en BVLOS le rapprochement ou la collision avec un autre aéronef font partie des risques les plus importants.

Pour analyser un événement de ce type, il est possible d’utiliser une démarche inspirée de celle utilisée par le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile (BEA). De manière simplifiée, il s’agit dans un premier temps de chercher ici à identifier toutes les barrières qui permettent d’éviter qu’un tel événement ne se produise.

Dans notre cas, voici quelques points qui peuvent guider l’analyse. Pour gérer le risque de collision avec un autre aéronef, l’exploitant d’UAS prévoit des moyens d’atténuation à différents niveaux :

Au niveau stratégique

Une mesure d’atténuation du risque est dite stratégique lorsqu’elle est mise en œuvre en amont du vol et qu’elle vise à diminuer le risque avant même la réalisation de la mission.
En l’occurrence, le risque de collision avec un autre aéronef est géré stratégiquement par deux mesures :

  1. Le choix d’une hauteur de vol faible, inférieure au plancher d’évolution habituelle des aéronefs habités (500 ft).
  2. La publication de NOTAM pour prévenir les usagers de l’espace aérien de l’opération de drone. Le NOTAM inclut le secteur géographique de l’activité ainsi que ses horaires.

>> Ces mesures ont-elles été efficaces ?

  • Le choix de la hauteur de vol est judicieux et dans ce cas a contribué à prévenir la collision. Il est néanmoins habituel que des aéronefs évoluent sous le plancher des 500 ft pour les besoins d’une mission de travail aérien (urgence médicale, vols militaires ou civils sous autorisation), d’un exercice d’atterrissage en campagne, ou encore en vol de pente pour les planeurs par exemple. Cette seule mesure ne saurait être suffisante, a fortiori en BVLOS.
  • Le pilote de l’avion indique que ce jour-là, la taille de la zone de vol l’a conduit à consulter plus de 460 NOTAM dans un dossier de 25 pages. Les deux NOTAM concernant les vols de drones figuraient seuls sur la dernière page en fin de liste. La présentation de l’information aéronautique a contribué à ce que le pilote ne prenne pas connaissance de ces NOTAM. Là encore, bien que la consultation des NOTAM soit obligatoire, cet événement (comme de nombreux autres en aviation habitée) illustre la faible robustesse de cette barrière de sécurité, qui ne saurait donc garantir à elle seule un bon niveau de sécurité d’une opération.
Remarque : une mesure couramment employée pour gérer le risque de collision est le recours à la Zone Réglementée Temporaire (ZRT) afin de séparer le trafic UAS du trafic habité (on parle alors de ségrégation). Les limites sont les mêmes : la consultation des ZRT actives est fastidieuse et ne saurait garantir à elle seule leur respect. Plusieurs événements l’ont également illustré.

Au niveau tactique

Une mesure d’atténuation du risque est dite tactique lorsqu’elle est mise en œuvre en cours de mission et qu’elle vise à gérer le risque résiduel après la mise en œuvre des mesures stratégiques.

Dans notre évènement, les mesures tactiques suivantes sont prévues par l’exploitant d’UAS :

  1. L’UAS est équipé ADSB-in, c’est-à-dire que le télépilote dispose sur sa station sol d’un écran représentant la position des aéronefs (habités ou non) équipés de la technologie ADSB-out leur permettant de transmettre leur position via des récepteurs au sol (c’est notamment le principe de flightradar24).
  2. Une alarme sonore informe le personnel au sol de la détection d’un trafic habité.
  3. La veille de la fréquence VHF, permettant au télépilote d’entendre les trafics évoluant à proximité. Au besoin, le télépilote peut signaler sa présence (position, hauteur, intentions) ou engager une manœuvre d’évitement. Pour cela, l’opérateur préprogramme les fréquences adaptées au secteur d’évolution (Il convient de rappeler que seul un télépilote détenteur d’une qualification radio, incluse dans une licence d’aéronef habité, est autorisé à utiliser ce type d’équipement.)

>> Ces mesures ont-elles été efficaces ?

  • La technologie ADSB-in est fiable et de plus en plus répandue. Le taux d’équipement de l’ensemble des aéronefs habités est cependant inconnu, de sorte qu’il est impossible de garantir la détection de tous les aéronefs habités. En outre, en raison de la configuration de la station sol lors de l’évènement, celle-ci n’affichait que les trafics compatibles avec le choix du zoom de l’écran. Autrement dit, si le télépilote, pour les besoins de sa mission, avait affiché un zoom important sur son écran pour visualiser la carte à proximité immédiate de l’UAS, il ne pouvait visualiser les trafics « plus loin » que le zoom de l’écran. Ainsi, le jour de l’événement, et bien que l’avion transmettait sa position en ADSB, le télépilote n’était pas en mesure de le percevoir sur son écran.
  • L’environnement sonore au moment de la détection du trafic via l’ADSB n’a pas permis au personnel de la percevoir.
  • La veille de la fréquence permet de connaître en temps réel la position approximative des aéronefs habités et les intentions des équipages. Il est à noter que l’emport et l’utilisation d’une radio VHF n’est pas obligatoire dans tous les espaces aériens. C’est néanmoins dans cet événement la barrière ultime qui a permis de maintenir le contrôle de la situation. En outre, cette veille radio doit être adaptée à l’environnement aéronautique situé autour de la zone d’opérations : il peut être utile de rester à l’écoute des fréquences d’aérodromes en auto-information à proximité. Dans le cas évoqué, c’est sur cette fréquence que la déconfliction a pu se faire (Les fréquences du Service d’Information de Vol ou d’un AFIS peuvent également être utilisées).

Quels enseignements tirer de cet évènement ?

Cet incident, sans conséquence, illustre la nécessité de mesures de sécurité multiples, s’inscrivant à différents niveaux (ici, stratégique et tactique) comme le prévoit le modèle de James Reason (plus connu sous le nom des plaques de Reason ou en anglais du Swiss cheese model).

Chacune des barrières vues précédemment, prise isolément, a montré sa fragilité, réelle ou potentielle. Elles sont sans doute fonctionné dans bien d'autres cas : c’est bien leur union qui offre un niveau de sécurité acceptable.

À l’issue de cet événement, l’exploitant UAS a modifié ses procédures de préparation de mission de manière à renforcer une mesure stratégique de coordination de ses missions avec l’exploitant avion. En outre, l’interface de la station sol a été modifiée de manière à alerter les personnels au sol de tout trafic ADSB détecté, indépendamment de la configuration d’affichage de la station sol. Le niveau de l’alarme sonore annonçant le trafic a été par ailleurs augmenté. Enfin, le constructeur de l’UAS a développé des procédures d’urgence associées aux alarmes de rapprochement de trafics, de manière à prévoir des réponses immédiates et systématiques selon le niveau d’alarme déclenché.

Ce sont des barrières tactiques qui ont ainsi été renforcées.

Remarque : L’exploitant avion a également pris des mesures qui ne sont pas détaillées ici.
Photo prise depuis l’avion : « voir et éviter » certes… À vos lunettes !
– Reproduction avec l’accord de l’exploitant, réponse au prochain numéro 😊

COLLISION AVEC LE SOL À LA SUITE DE DÉFAILLANCES DE BATTERIES

Plusieurs événements notifiés concernent la chute d’un UAS en raison d’une défaillance de batterie. Voici quelques exemples reçus :

  1. Au cours d’un vol sous scénario S3, l’exploitant explique que le niveau de charge de la batterie de son UAS atteint 26%. Ayant déjà testé sa batterie à des niveaux de charge plus faibles, il décide de poursuivre son vol. Il indique que les moteurs se coupent alors soudainement et l’UAS chute dans la rivière qu’il survolait. Le log du vol confirme une coupure brutale des moteurs à 26% de batterie. L’exploitant avait configuré ses alertes de la manière suivante :
    • Alerte batterie à 25%
    • RTH à 20%
    • Atterrissage automatique à 15%
    Il n’a pas été possible d’identifier les raisons de la coupure moteur à 26% de batterie.
  2. Un exploitant opérant en catégorie Ouverte indique que la batterie de son UAS s’est coupée subitement et sans alerte préalable. L’exploitant a mis la batterie au rebut.

Ces événements rappellent que les mesures de sécurité prévues par les cadres d’exploitation de l’UAS, notamment la réservation d’un périmètre de sécurité au sol, ont permis de ne pas exposer de tiers. Il peut être utile de rappeler que les batteries sont des éléments sensibles de l’UAS. Elles disposent d’une durée de vie limite et leur capacité décroit avec le temps et avec l’augmentation des cycles de charge / décharge. Certaines batteries sont vendues avec des garanties de tenue d’un nombre minimal de cycles. Il convient d’être vigilant quant au suivi des batteries : vérifiez leurs tensions et l’équilibrage des cellules, leur niveau de charge maximal et, bien entendu, surveillez toute déformation ou choc sur une batterie pour éviter un emballement thermique pouvant conduire à un incendie. Pour prolonger la durée de vie de la batterie, il peut être recommandé de les maintenir avec un niveau de charge approprié (30-50%) lors d’un stockage de longue durée.

@beginner_drones
Enfin, et particulièrement en période hivernale, il est rappelé que les batteries sont sensibles au froid qui réduit leur capacité. Avant des missions qui peuvent être longues et nécessiter plusieurs batteries, il peut être conseillé de maintenir les batteries de rechange dans des environnements chauffés avant de les installer dans l’UAS. Soyez vigilants sur l’autonomie de vos drones en hiver !

(PAS TROP) EN VRAC, POUR FINIR...

Quelques événements plus ou moins originaux à signaler :

  • Un citoyen incommodé par le bruit d’un UAS… lui tire dessus, et fait mouche ! La justice s’est saisie de ce cas, mais ne sous-estimons pas la perception que les tiers peuvent avoir sur les activités drones
  • Des collisions ou quasi-collisions avec des oiseaux
  • Des fly-away, souvent sans conséquences, mais qui continuent d’arriver…
  • Des collisions avec des obstacles en raison de distances mal évaluées ou de pilotage imprécis
  • Des pertes de contrôles à la suite de la perte du signal GPS : vous entraînez-vous régulièrement au pilotage en mode « ATTI » sans assistance GPS pour le maintien de la position ? Ne vous laissez pas surprendre !

Le bulletin AlphaTango, c'est :

  1. Partager de l’information. pour vous permettre (exploitants, constructeurs) de tirer parti de l’expérience de tous
  2. Proposer des rappels réglementaires. Hé oui, la DSAC est avant tout l’autorité de surveillance. Toujours dans un contexte de culture juste !
  3. Proposer des analyses de sécurité, inciter les exploitants à la réflexion et encourager des évolutions motivées par des gains de sécurité.
Les guides de la DSAC sont toujours disponibles et régulièrement mis à jour :

Guide sur la catégorie Ouverte, destiné aux télépilotes de loisir hors associations d'aéromodélisme et aux exploitants professionnels qui opèrent sur des opérations à faible risque (en vue directe, hors zones restreintes)

Guide sur la catégorie Spécifique, destiné aux exploitants professionnels qui opèrent dans d'autres types d'opérations

Guide destiné aux associations d'aéromodélisme

Objectif Sécurité est label de promotion de la sécurité de la direction de la sécurité de l’aviation civile (DSAC). Il regroupe toutes les publications visant à fournir à chaque acteur aéronautique des informations utiles et nécessaires à connaître, dans un objectif d’amélioration continue de la sécurité aérienne. Via l’exploitation et l’analyse des données et informations de sécurité de toute provenance (incidents notifiés par les opérateurs, rapports d’enquêtes, médias, etc.), il a pour ambition d’améliorer la conscience collective des enjeux de sécurité, et de participer ainsi au développement d’une culture partagée en la matière.
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